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  • Writer's pictureFrançois Plattard

Christopher Bibaku

Updated: Jun 10, 2020

Alors que la 2 Liga (2e division autrichienne) a repris le weekend dernier, nous publions notre entretien avec Christopher Bibaku. Quand nous avions interviewé Christopher en janvier durant la trêve hivernale son équipe était 3e du championnat alors qu’elle avait pour objectif de finir entre la 10 et 13e place! Extraits choisis d’un footballeur plein de hargne et de self belief qui a pour objectif de jouer la Ligue des Champions avec Arsenal. Vous l’avez lu ici en premier!






Bonjour Christopher - peux tu nous raconter comment tu as commencé dans le foot?


J’ai commencé à jouer au foot dans ma cité à Sartrouville depuis mon enfance ainsi que dans les villes aux alentours. Le vrai moment ou j’ai commencé à jouer au foot à un certain niveau c’est quand je suis arrivé à Poissy à 17 ans ou j’évoluais en DHR. Je n’ai jamais fait de centre de formation, j’ai avancé avec la hargne et une grosse automotivation. En arrivant à Poissy j’ai eu de la chance - un joueur avait un agent en République Tchèque qui cherchait un attaquant. Mon rêve était toujours de jouer au foot sans avoir le besoin d’exercer une autre profession afin de pouvoir me consacrer exclusivement sur ma carrière. Je suis arrivé en janvier 2018 au TJL Petrovice qui était dernier de 4e division Tchèque et je devais sauver le club de la descente. J’ai marqué 7 buts et on est pas descendu avant que la ligue décide de reléguer les 3 derniers clubs (et non pas les 2 derniers comme c’était prévu). J’avais rempli mon objectif et je cherchais quelque chose de plus grand - j’ai signé rapidement au MFK Havirov toujours en 4e division mais eux avait fini 2e.


4e division Tchèque c’est l'équivalent d’une bonne DHR en France?


A mon avis c’est le niveau en dessous! En Ile de France je pense qu’on a les meilleurs talents. Moi je jouais en DHR/DSR et mon niveau était limite (Rires) alors qu’en République Tchèque je pouvais jouer en pro dans une division plus basse. Maintenant je me suis bien amélioré et ça serait sans doute différent. Quand on vient de région parisienne on a plein de facilités que l’on ne pensait pas avoir avant de s'expatrier dans une autre ligue.


Dans quel(s) domaine(s) en particulier?


Technique bien sur! Physiquement c’était beaucoup plus dur en République Tchèque, j’appelai cela l’UFC (Rires).Ils y vont fort! Des coups dans le dos quand tu protèges ton ballon, des tacles plus que limite ils y vont sans retenu. En France on va mettre plus l’accent sur le jeu propre, technique, bon tactiquement … un peu de tout en fait.


En 4e division Tchèque tu pouvais vivre de ton football?


Moi mes conditions avant de signer c’était d’avoir un logement et un salaire. J’étais prêt à être seulement logé tellement je voulais voir ce que c’était de vivre du football. Dans les 2 clubs ou j’ai joué mon appartement était pris en charge et j’étais payé aux alentours de 5000 couronnes (150-200 EUR) ce qui était suffisant pour manger.





Et du coup après tu es arrivé en Autriche?



En novembre 2018 il restait plus que deux matchs avant la trêve hivernale. J'étais à un seul but mais sept passes décisives car très altruiste devant le but Dans les tribunes il y avait un scout qui cherchait des talents pour l’Autriche. C'était vraiment ce que je cherchais depuis le début c’est à dire de me faire repérer par quelqu'un dans les tribunes parce qu'on sait que dans le foot, un seul match change la vie. Durant une action de match il a apprécié ma pointe de vitesse et le fait que les défenseurs ne pouvaient pas me suivre et ça lui a fait tilt. Après le match il m’a dit que j’avais une grosse marge de progression à condition de m'entourer de meilleurs joueurs. Il m'a parlé de l'Autriche et m'a dit que ça avait un meilleur football, un championnat un peu plus médiatisé et qu’en termes d'argent ça serait un grand saut même si c’est pas comparable aux grand championnats. En novembre j’ai pris ma voiture de République Tchèque pour un petit village en Autriche pour effectuer un entraînement avec une équipe de 5e division et j’étais clairement au dessus du lot. Le manager m’a dit que j’avais le niveau au minimum pour la 3e division et m’a dit de revenir en janvier en me promettant de me trouver un club alors qu’on se connaissait à peine.


Je suis retourné en janvier 2019 pour m’entrainer avec un club de 4e division, mais après quelques semaines il ne me faisait toujours pas d’offre.Et un moment, j'ai un peu pété les plombs, je me suis dit que si je me blessais j’étais mort. Ils me disaient que j’allais être payé etc… mais toujours pas de contrat et mon hôtel commençait à me couter cher. Mon agent avait aussi envoyé mes vidéos de mes moments forts au Hertha Wels (un club de 3e division)qui m’a pris à l’essai pendant leur préparation hivernale. Moi mes essais je les rate pas (Rires). Après 2 entrainements et 1 matchs j’ai reçu une offre alors que je n’ai pas marqué mais mon altruisme à parlé pour moi..


Mais tu n’es resté là-bas qu’une demi saison…


(Rires) Oui comme dans pas mal de mes clubs! J’ai mis 5 buts et 3 passes décisives en 13 matches donc plutôt pas mal! C’était un début très prometteur, je jouais bien, je gagnais 5 fois plus qu’avant, le club me logeais dans un super appart mais tout s’est arrêté en mai quand une nouvelle direction est arrivée au club et a changée la structure interne. Ils m’ont assuré que le futur du club se ferait avec moi et que j’allais recevoir un nouveau contrat prochainement et au dernier moment en juin ils me l’ont mise à l’envers et je me suis retrouvé sans rien. J’ai demandé à mon agent de me retrouver un autre club , il y a même eu des rumeurs à la FootMercato comme quoi des clubs de première division étaient intéressés! J’ai reçu une invitation de mon club actuel le Vorwärts Steyr (2e division) pour un test. C’était super dur, physiquement il y avait une vraie différence! C’était pas dans les coups ou les tacles mais plutôt l’intensité des courses et je me suis retrouvé dépassé! Dans le match de préparation on perd 1-0 et je rentre en 2e mi-temps et je marque 2 buts de la tête et on gagne 2-1. Je me suis dit que c’était bon mais ils m’ont demandé de refaire un match contre… mon ancien club ou j’ai mis une passe décisive et on gagne 4-1 et j’ai reçu mon contrat dans la foulée.


Et c’est l'aboutissement d’un rêve que d'être finalement pro?



Oui c’est la raison pour laquelle je faisais tant de sacrifices ,de laisser ma famille et mes potes pour me consacrer à ma passion. Vivre du football, être médiatisé et être un exemple aux plus jeunes c’était super important pour moi. Mais ce dont j’étais le plus fier c’était de montrer à tous ceux qui me disaient que c’était trop tard pour moi d’être pro. Je me revois encore faisant mes sessions seul avec mes plots et mon ballon en y croyant dur comme fer! C’est vraiment l’aboutissement d’un rêve!





Il ya beaucoup d’étranger en 2e division en Autriche?


Il y a pas mal d’étrangers qui utilisent ce championnat comme un tremplin. A ma connaissance je suis le seul français dans cette division. Il y a pas beaucoup de Noirs dans cette division si tu compares à la première division par exemple. La plupart des étrangers je les appellerai pas vraiment des étrangers (Rires) car ils sont tellement proches de chez eux. C’est surtout beaucoup des croates, des serbes, slovènes


Tu as été victime de racisme étant l’un des seul joueur noir dans cette division?


En Autriche non mais en République Tchèque je l’ai ressenti même si c’était pas directement dans ma face. Au final tu dois toujours t’adapter au regard des gens, la façon dont on te parle. Il y a toujours cette forme de racisme ou je dirai plutôt cette discrimination. Tu vas pas être traité comme tout le monde. Si je fais la même chose qu’un Autrichien il ya toujours ce petit truc -ils le font pas exprès- mais il faudra toujours que je fasse plus. Je m’en plains pas parce que ça sera toujours comme ça dans le monde mais ça peut être difficile à vivre. Je m’en sors bien car je n’ai pas connu de gros épisode de racisme mais il y a cette forme de discrimination qui me fait sentir parfois qu’on est pas traité de façon égale. Je suis le seul noir de mon équipe ce qui est à double facette. Quand je brille on voit que moi ce qui est super mais quand ça va moins bien c’est un peu plus difficile pour moi.



Un joueur gagne en moyenne combien dans ta division?


Je dirai entre 1000 et 1500 EUR par mois en plus du logement pour certains joueurs. On a aussi un bon petit billet pour chaque victoire ou le point du nul donc je vis confortablement même si c’est très différent du stéréotype du joueur de foot. Ca reste la genèse du footballeur pro mais au moins je vis de ma passion.


Ton quotidien ressemble à quoi?


Je me réveille tous les jours à 8h du matin et je pars à la salle avec mon shaker à 10H, cela va dépendre aussi de notre entraînement du matin si il a lieu. Beaucoup de joueurs autrichiens doivent continuer à travailler sur le côté donc les horaires des entrainement sont adaptés.

Après mon entrainement ou la salle je rentre déjeuner, j’enchaine une sieste de 30 minutes et je joue à la PlayStation jusqu'à mon entraînement de l’après midi à 17h30. J’écoute aussi pas mal de speech de motivation comme Eric Thomas. Je rentre dîner puis je retourne sur ma PlayStation. Je joue à pas mal de jeux mangas en ce moment, ça permet de rester en contact avec mes amis en France, d’ailleurs c’est surtout pour cela que je joue. Je suis au lit à 23H pour bien prendre soin de mon corps.On a les matches le vendredi soir et donc ça nous fait des courtes semaines qui passent vite.


Tu as souvent dit que tes potes te manquent - tu penses retourner jouer en France?


Pas vraiment. C’est en quittant la France que j’ai pu percer et devenir pro. La France je la vois d’un oeil différent maintenant. C’est plus un truc personnel le fait de pas vouloir y retourner. Mon rêve ultime c’est l’Angleterre dans n’importe quelle division professionnelle.Je vois les choses en grand, et c’est ce qui m’a fait avancer. Si tu me suis tant mieux sinon c’est pas grave je reste dans mon monde de folie et je sais que j’y arriverai. Il y a pleins de gens qui me disaient “Qu’est ce que tu fous en République Tchèque dans un championnat tout pété”. Les choses ont changé l’été dernier quand j’ai signé mon contrat pro en Autriche.Je suis en train de fermer beaucoup de bouches et c’est ce qui fait avancer. Le rêve c’est Arsenal et la Champions League. J’ai deux petits frères qui ont 16 et 18 ans et je dois être un modèle de détermination et leur montrer qu’on peut tout faire avec de la détermination et des sacrifices.







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